POÉSIES DIVERSES SUR L'ASTRONOMIE ET LA GÉOGRAPHIE. TRADUITES PAR EDOUARD SAVIOT. C. L. F. Panckoucke, 1843 I SUR L'ASTRONOMIE.
POÉSIES DIVERSES SUR L'ASTRONOMIE ET LA GÉOGRAPHIE.
TRADUITES PAR EDOUARD SAVIOT.
C. L. F. Panckoucke, 1843
I
SUR L'ASTRONOMIE.
PEUT-ÊTRE qu'étendu au fond d'un bois sacré , tu enfantes des vers au hasard ; peut-être qu'au milieu des fontaines murmurantes et des brises harmonieuses tu rafraîchis ton âme aux sources divines du Pierius : mais nous, le poids des affaires nous accable ; nous n'entendons que le bruit importun du fer, les cris de mille soldats ; les harangueurs nous obsèdent, et le forum retentit de clameurs; les trompettes sonnent, et nous volons par-delà l'Océan ; le Vascon au sein des neiges, le Cantabre dans ses montagnes, ne nous laissent point de repos. Et c'est à nous qu'on ordonne de ceindre notre front des lauriers de Phébus, et de nous tresser avec du lierre une couronne plus auguste ! Et c'est nous qu'on appelle à fendre de nos ailes l'air enflammé ! L'éléphant, à la marche pesante, devancera à la course les aigles à l'aile rapide ; la tortue engourdie l'emportera sur le chien en vitesse, avant que nos vers puissent s'élever jusqu'à Phébé, mère des bienfaisantes rosées. Toutefois, secouant le poids qui me courbe vers la terre, je dirai pourquoi un cercle noir se forme sur les contours défaillants de l'astre, pourquoi son front de neige se rougit d'une teinte de pourpre. Non, jamais, comme le croit le vulgaire, une magicienne hurlant dans les sombres profondeurs des cavernes infernales n'a arraché la Lune à sa demeure céleste ; non, la force d'un enchantement nocturne .... Jamais il ne fut nécessaire de la délivrer par le son de la trompette. Au milieu du ciel, et voisine des régions où le calme est souvent troublé par la tempête, elle marche sans éprouver d'outrage. Mais quand le vaste corps de la terre, placé au centre du monde, intercepte les rayons du Soleil son frère, alors une ombre épaisse se répand sur le disque pâlissant de la lune, jusqu'à ce que celle-ci , se dégageant des ténèbres projetées par les inégalités terrestres, roule en liberté dans un autre champ du ciel et recouvre les rayons de Phébus. Peut-être on s'étonnera que le Soleil, neuf fois plus grand et plus apparent que le globe de la terre, n'enveloppe pas ce globe d'un réseau de lumière. En voici la raison. Voyez comme le Soleil s'élève, quand il monte à la voûte éclatante des cieux, et comme du haut de son char il couvre de ses rayons la masse infinie de la terre. Or, soit qu'il lance la lumière du zénith, soit qu'il l'envoie obliquement en rasant l'horizon, la terre brise une partie de ces rayons. Les autres, ne trouvant point de globe qui s'oppose à leur émission, se prolongent dans l'immensité du vide, jusqu'à ce que, vaincus par l'ombre, ils viennent mourir en pointe. Si donc la Lune pousse ses chevaux robustes dans les régions trop voisines de la terre, elle ne reçoit plus la lumière de son frère, son pâle visage s'évanouit. Mais pourquoi est-elle le seul astre qui soit soumis aux éclipses ? Le fait n'a rien d'étonnant : elle manque de lumière qui lui soit propre, elle n'est réchauffée que par des rayons d'emprunt ; quand elle tombe dans le voisinage d'un corps opaque, elle devient sombre et n'est plus éclairée par les feux de son frère. Au contraire, le choeur des astres n'est point accessible aux ténèbres ; ils jouissent d'un éclat qui leur est naturel, ils ne le doivent pas au Soleil. Mais.... elle est entraînée avec la sphère céleste plus loin que le Soleil. Ce qui fait que son disque n'est pas éclipsé tous les six mois, c'est qu'il décrit dans son cours oblique une ligne sinueuse. Et tandis que la Lune vagabonde suit les détours de son invariable carrière, le Soleil franchit les obstacles qui brisaient ses rayons, il déchire le manteau de la nuit, et verse sur sa soeur des torrents de lumière. C'est une cause analogue qui éteint tout à coup dans l'ombre l'éclat sacré du Soleil : la Lune étend son corps privé de lumière entre cet astre et la terre, et elle intercepte ses rayons avant qu'ils arrivent jusqu'à nous.
https://remacle.org/bloodwolf/erudits/inconnus/astro.htm
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